Jean-Marie Gourreau – Blog Critiphotodanse / 12 octobre 2012

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Suite à la générale du 10 octobre 2012 de Sous ma peau, spectacle présenté au Théâtre de l’Etoile du Nord du jeudi 11 au samedi 13 octobre 2012 dans le cadre du festival Avis de turbulences #8.

Françoise Tartinville et Maxence Rey / Blanc brut – Sous ma peau / Le masculin et le féminin
Il est rare de voir deux pièces aussi complémentaires dans une même soirée : si Françoise Tartinville évoque deux forces masculines diamétralement opposées qui s’affrontent, Maxence Rey quant à elle interroge les émotions et fantasmes qui sourdent sous la peau de trois femmes, les étreignent et les torturent.
Blanc brut est le second volet d’un triptyque chorégraphique axé sur le masculin, Intérieur crème.
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Sous ma peau 03 - © JM Gourreau

© JM Gourreau

Univers diamétralement opposé que celui de Maxence Rey qui expose et met en scène, dans la seconde partie
de la soirée, trois femmes dans leur singularité, laissant éclater leur violence intérieure au travers de leur peau. Elles vont ainsi évoluer totalement nues, mettant en avant durant presque une heure leur pudeur, faisant parler leur chair, disséquant consciemment ou inconsciemment les émotions et sentiments qui les animent dans le partage. La nudité renforce leur expressivité mais aussi leur fragilité. Tout est crûment dit, sans détours mais aussi et surtout sans vulgarité. Trois femmes rendues anonymes par une perruque noire, les traits de leurs visages effacés par une « seconde peau », obligeant leur corps seul à parler.
Des corps sculptés par les lumières tantôt feutrées, tantôt violentes de Cyril Leclerc, mettant certes en valeur leurs attitudes sculpturales – on pense par moments à certaines œuvres de Camille Claudel – mais aussi et surtout les pulsions sourdes qui les animent et qui reflètent tantôt leur féminité, leur générosité, leur tendresse intrinsèque, leur amour et leur respect pour l’autre, tantôt leur animalité profonde, instinctive, tantôt les vicissitudes de l’existence, reflets fidèles du monde implacable qui nous entoure. L’instant le plus poignant se situe sans nul doute à la fin de l’œuvre, au moment où les trois protagonistes, debout à l’avant-scène, immobiles face aux spectateurs, les scrutent à visage découvert, générant un effet miroir, les contraignant à baisser le regard, comme pour les provoquer, les obliger à se sentir concernés, les culpabiliser : leurs traits expriment par instants la joie, le bonheur et l’émerveillement devant la complexité infinie des corps mais aussi et surtout la fatalité, la douleur, la peur, le désespoir, comme si ce public en portait l’entière responsabilité. Une première ébauche de l’œuvre, qui avait été présentée sur cette même scène en janvier dernier (cf. critiphotodanse, 22 janvier 2012), laissait présager de la force incommensurable de la pièce achevée. Nous n’avons pas été déçus : celle-ci révèle en effet une chorégraphe engagée qui ne « mâche » pas ses gestes, qui ose dire crûment et sans détours ce qu’elle pense et avec laquelle il faudra désormais compter.

Sous ma peau 02 - © JM Gourreau

© JM Gourreau

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